Proposition 54K3147

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Projet de loi portant des dispositions diverses en matière d'impôts sur les revenus.

General information

Submitted by
MR Swedish coalition
Submission date
June 11, 2018
Official page
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Status
Adopted
Requirement
Simple
Subjects
tax evasion tax law tax on capital corporation tax tax-free allowance

Voting

Voted to adopt
CD&V Open Vld N-VA MR
Voted to reject
Groen Vooruit Ecolo LE PS | SP DéFI PVDA | PTB
Abstained from voting
PP VB

Party dissidents

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Discussion

July 19, 2018 | Plenary session (Chamber of representatives)

Full source


President Siegfried Bracke

Les rapporteurs, MM. Laaouej et Piedboeuf, se réfèrent au rapport écrit.


Georges Gilkinet Ecolo

Monsieur le président, monsieur le ministre, l'avis du Conseil d'État dit tout sur la qualité de ce projet de loi. C'est en fait une loi correctrice de la loi fourre-tout rapidement votée au mois de décembre pour réformer notamment l'impôt des sociétés. Cette loi correctrice a elle-même été amendée en long et en large en commission. Nous avons demandé une deuxième lecture; à cette occasion, les services du Parlement nous ont remis une note légistique qui a nécessité encore des corrections.

Le Conseil d'État dénonce, et nous aussi, cette manière déplorable de fonctionner dans des matières techniques et délicates que sont celles de l'impôt, notamment quant à la capacité d'évaluer les intentions du gouvernement et l'impact budgétaire des mesures finalement votées. C'est d'autant plus problématique que, parmi les mesures mises à l'examen, des changements peuvent avoir des répercussions importantes en matière de calcul d'évaluation des prix de transfert; mesures qui peuvent avoir, pour certaines entreprises, un impact se chiffrant en millions, voire en dizaine de millions d'euros; d'autant plus pour le budget de l'État et les finances publiques.

C'est à l'image, en matière fiscale, de l'action de ce gouvernement: des intentions un peu vagues figurant dans l'exposé des motifs des projets de loi que vous nous soumettez; des surévaluations en termes d'impact budgétaire des recettes, lesquelles ne se vérifient jamais au moment du calcul de l'impôt; un déficit qui se creuse et pèsera sur les générations futures et la capacité d'investissement dans l'économie de demain et dans la cohésion sociale.

Malheureusement, ce projet de loi ne dément pas les mauvaises habitudes du gouvernement.

Je voudrais tout particulièrement épingler trois mesures qui nous posent problème dans ce texte. La première, c'est l'augmentation de la possibilité de déduction des revenus d'actions, à hauteur de 800 euros. Cette mesure est anti-redistributive, en ce sens qu'elle va renforcer les moyens financiers des personnes qui ont déjà la capacité d'investir en actions. Si c'est le cas, ce sera au détriment de toutes les autres, bien plus nombreuses, qui ne peuvent pas investir en actions et certainement pas pour des revenus au-delà des 800 euros.

Cette mesure est coûteuse. Pour rappel, il s'agissait au début de remplacer l'exonération des premiers revenus d'intérêts sur les carnets d'épargne. Mais vu les taux d'intérêt actuellement appliqués, cette mesure était devenue très peu coûteuse pour les finances publiques, puisque très peu de contribuables arrivaient à ce plafond. Une mesure qui ne coûte plus rien est remplacée par une mesure dont l'impact budgétaire est mal évalué et qui risque de peser très fortement sur les finances publiques.

Enfin, elle n'est pas suffisamment ciblée, et c'est une autre constante de l'action de votre gouvernement. Nous pensons effectivement que certains secteurs de l'économie, particulièrement novateurs, particulièrement positifs en matière de possibilités de création d'emplois, qui sont particulièrement moteurs pour l'économie belge de demain, peuvent faire l'objet de mesures ciblées, d'un soutien particulier.

Mais votre mesure s'adresse au tout venant. Quel que soit le domaine d'activité économique dans lequel on investit via ces actions, on bénéficiera de cette exonération. Il faut être beaucoup plus ciblé vers les secteurs d'avenir, vers les secteurs susceptibles de refaire tendre notre économie vers l'excellence et susciter des investissements et de la création d'emplois.

La deuxième mesure que je voulais épingler est celle qui concerne les corrections apportées aux conditions minimales de revenus des dirigeants de PME à respecter pour bénéficier de la réduction d'impôts pour les PME. Lors de l'adoption de la réforme de l'impôt des sociétés, nous avions auditionné des représentants des PME, notamment l'Union des classes moyennes, qui avaient dénoncé la hauteur des plafonds et des revenus minimums devant être octroyés aux dirigeants de PME pour leur permettre de bénéficier de cette réduction d'impôts. Il y a des correctifs, mais qui sont totalement insuffisants.

Ce gouvernement reste sourd à des arguments qui sont pourtant pleins de sens économique. Ce sont ceux répétés notamment par l'Union des classes moyennes qui dit que certains entrepreneurs, plutôt que de s'octroyer des salaires élevés, préfèrent réinvestir leurs bénéfices dans le renforcement de leur outil de production, dans l'investissement de matériel qui leur permettra de faire durer leur entreprise, plutôt que de viser le court terme et des revenus élevés. Vous restez sourds à ces arguments qui sont pourtant pleins de sens économique. Nous ne le comprenons pas. J'ai d'ailleurs redéposé, au nom de mon groupe, en deuxième lecture, des amendements qui permettaient de rabaisser ces plafonds de rémunération, sans plus de succès. Je le regrette mais cela ne nous empêchera pas de continuer de plaider en la matière.

Enfin, de façon un peu anodine et sans autre forme de commentaire, vous supprimez une mesure particulièrement intéressante sur le plan écologique. C'est la capacité, pour les entreprises, de déduire à 125 % les frais engagés dans l'organisation de transports collectifs pour leurs travailleurs, dans l'organisation et le soutien aux travailleurs et travailleuses qui se rendraient au travail à vélo (parking à vélo, vestiaires, réparation de vélos, etc.). Vous supprimez purement et simplement cette mesure.

À nouveau, vous êtes complètement à contre-courant des enjeux tout à fait contemporains de santé publique, entre autres la santé de ceux qui se rendent au travail à vélo. En tant que cycliste régulier, vous savez combien le vélo permet d'entretenir sa santé. Mais plus de vélos sur la route, c'est aussi moins de voitures et moins de pollution par particules fines et donc moins de maladies cardiovasculaires et autres. Mais, aussi en matière de mobilité et d'économie, et c'est un des indicateurs que nous avons mis en évidence ce matin dans les chiffres proposés par Ecolo-Groen pour évaluer l'action du gouvernement, la Belgique est un des pays les plus embouteillés en Europe. Les embouteillages qui la caractérisent chaque matin et chaque soir coûtent évidemment très cher à notre économie. Les travailleurs qui sont coincés dans les embouteillages sont des travailleurs non productifs. Le coût des embouteillages se chiffre en milliards d'euros selon les évaluations de la FEB, qui n'est pas le bureau d'études d'Ecolo ou de Groen.

Il est question de plus de 8 milliards d'euros. Un gouvernement qui aurait une réelle vision en matière de mobilité, d'environnement, de santé publique, d'économies, devrait encourager les modes alternatifs de transport et, par ailleurs, même si ce n'est pas l'objet de ce texte, financer davantage la SNCB ainsi que les transports en commun.

Avec ce texte, c'est l'inverse que vous faites. Vous privilégiez ceux qui ont déjà beaucoup de moyens. Vous ne répondez pas aux attentes des PME. Vous n'encouragez pas les pratiques de mobilité modernes et favorisant la santé publique. C'est pour ces différentes raisons que nous ne pourrons pas soutenir ce texte mal fichu et dont les impacts budgétaires sont dangereux pour notre État.


Benoît Dispa LE

Monsieur le président, nous voterons, tout à l'heure, en rafale, une série de textes qui auront été examinés au cours des séances plénières à répétition tout au long de cette semaine. Nous pourrions déjà nous interroger sur cette façon de faire. Elle est sans doute inévitable puisque le calendrier parlemen­taire provoque, chaque fois en fin de session, un embouteillage de ce type.

Il n'empêche que c'est l'occasion de nous interroger sur la façon dont nous travaillons et sur la qualité du travail législatif et, en particulier, à l'examen de ce texte qui atteint un "sommet" dans la mauvaise qualité. On est ici en effet, face à un texte au sujet duquel le Conseil d'État a souligné à quel point il était insatisfaisant. Le Conseil d'État juge le caractère de la disposition légale "fourre-tout".

En effet, ce document que vous nous présentez comporte des dispositions relatives à l'activation de l'épargne incluant une révision du plafond, des dispositions limitant le taux de la cotisation distincte à 5 % en cas de non-respect de la rémunération minimale du dirigeant d'entreprise. Et sans doute, une prochaine modification législative sera-t-elle nécessaire afin de supprimer totalement cette cotisation injuste. Cette loi fourre-tout comporte, par ailleurs, des corrections techniques dont la portée est souvent floue.

Nous sommes face à un texte dont le caractère fourre-tout doit nous interpeller. Comme le dit le Conseil d'État, on atteint ici un degré supérieur dans la façon dont le travail est bâclé puisqu'il est ici question de corriger des dispositions légales, celles de la fin de l'année 2017, de la fameuse loi-programme du 25 décembre et de la loi de la même date portant réforme de l'ISOC.

Ces dispositions étaient elles-mêmes déjà des mesures fourre-tout, dont on disait déjà qu'il allait falloir les corriger. Nous avions donc adopté une loi en sachant bien qu'elle était imparfaite. L'exposé général de votre projet vient le confirmer, puisqu'il énonce de manière assez transparente qu'il est apparu qu'à la suite de l'examen des dispositions de décembre 2017, des améliorations étaient souhaitables afin de préciser et compléter leur portée. Autrement dit, nous avons sciemment voté un texte notoirement imparfait.

Qui plus est, nous sommes d'ores et déjà sûrs que nous n'en resterons pas là. En effet, lorsque fut abordé en commission ce problème de loi réparatrice, un membre éminent de la majorité a signalé que d'autres mesures correctives viendraient probablement s'ajouter.

Le Conseil d'État nous indique que nous ne pouvons pas continuer de travailler de cette manière. Un travail aussi bâclé portera préjudice non seulement à la qualité des textes, mais aussi à un principe fondamental en matière fiscale, qui est celui de l'égalité. La sécurité juridique en ce domaine – et ce n'est pas à vous que je dois le dire, monsieur le ministre – est évidemment essentielle. Le contribuable doit savoir en temps utile quels seront les effets juridiques et fiscaux de ses activités. Le peu de transparence qui caractérise la manière dont les modifications sont proposées ne peut qu'accroître l'insécurité juridique. Le Conseil d'État en conclut purement et simplement que, dans ces conditions, il se trouve dans l'incapacité d'assumer sa mission consultative.

Je considère qu'il importe d'entendre ce signal d'alarme du Conseil d'État, qui n'est pas une institution dont on peut balayer les remarques d'un revers de la main. En l'espèce, son avis est assassin. Le terme est sans doute trop souvent utilisé, mais nous avons rarement vu des remarques aussi critiques et négatives. En quelque sorte, le Conseil d'État est mis hors jeu. En tout cas, il se déclare dans l'incapacité d'examiner le texte de manière complète et approfondie. D'aucuns hausseront peut-être les épaules, en invoquant l'existence d'un accord politique, mais j'estime que, collectivement, nous aurions tout intérêt à entendre ces critiques. Le projet sera évidemment voté, si imparfait soit-il.

Nous devons nous interroger collectivement sur la façon de légiférer. Ce n'est pas parce qu'il y a un accord politique à un moment donné qu'il faut le traduire dans un texte coûte que coûte. Qu'il faut ainsi se satisfaire de dispositions fourre-tout qui sont corrigées par d'autres dispositions fourre-tout dont nous savons qu'elles-mêmes devront être corrigées à leur tour.

C'est une façon de travailler qui n'est pas satisfai­sante. On le dit régulièrement dans de savants colloques lorsque l'on s'interroge sur la qualité des textes juridiques, mais ici, dans ce cas précis, nous devons malheureusement en faire le constat et il n'y a pas lieu de s'en réjouir!

C'est la raison pour laquelle le groupe cdH, sur la procédure utilisée et indépendamment des incertitudes liées au contenu, votera contre le projet de façon à marquer le coup et relayer ainsi les insatisfactions du Conseil d'État, dans l'espoir qu'à l'avenir, nous puissions tenir compte de ses recommandations et revenir à un travail législatif de meilleure qualité. Ce serait utile pour la sécurité juridique en matière fiscale.


President Siegfried Bracke

D'autres membres demandent-ils la parole? (Non)

La parole est au ministre.


Ministre Johan Van Overtveldt

Monsieur le président, chers collègues, nous avons eu une discussion longue et intéressante en commission.

Pour le point très important soulevé par les deux intervenants au sujet du Conseil d'État, je souligne que ce dernier avait déjà noté dans son avis initial qu'il fallait effectivement introduire de nouveaux éléments concernant notamment les dispositions relatives aux transferts intragroupes, la législation CFC et la déduction des intérêts. Nous l'avons fait dans ce projet.

Je souligne également que la plupart de ces remarques concernent des dispositions qui n'entreront en vigueur qu'en 2019 et 2020. Les dispositions qui entrent en vigueur cette année consistent en de légères modifications et explica­tions et non en des changements substantiels.