Proposition 54K2847

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Proposition de résolution relative aux oeuvres d'art "translocalisées" et à l'entame d'un dialogue avec l'Etat français.

General information

Authors
MR Gautier Calomne, David Clarinval, Jean-Jacques Flahaux, Kattrin Jadin, Richard Miller
Submission date
Dec. 13, 2017
Official page
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Status
Adopted
Requirement
Simple
Subjects
France cultural heritage work of art resolution of parliament

Voting

Voted to adopt
Groen CD&V Vooruit Ecolo LE PS | SP DéFI Open Vld MR PVDA | PTB PP
Abstained from voting
N-VA VB

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Discussion

March 14, 2019 | Plenary session (Chamber of representatives)

Full source


President Siegfried Bracke

De rapporteurs, mevrouw Capoen en mevrouw Pehlivan, verwijzen naar het schriftelijk verslag.


Richard Miller MR

Monsieur le président, chers collègues, je ne serai pas long tout en prenant mon temps.

Je commencerai par quelques mots de remerciements au président de la commission des Relations extérieures, M. Van der Maelen, car il a permis le bon aboutissement de ce texte.

Je remercie les rapporteuses, mesdames Capoen et Pehlivan pour leur rapport qui contient, outre les débats que nous avons eus en commission, l'exposé de M. Guido Gryseels, le directeur du Musée royal de l'Afrique centrale ainsi que la note préparée par l'ex-secrétaire d'État, Mme Zuhal Demir.

Enfin, je remercie tous les membres de la commission des Relations extérieures qui ont contribué à approfondir ce sujet beaucoup plus complexe et plus progressiste qu'il n'y paraît à première vue. C'est grâce au travail des commissaires que le cadre initial de ma proposition de résolution, à savoir l'ouverture d'un dialogue avec la France, relatif aux œuvres d'art indûment emportées.

J'ai utilisé le terme technique qu'il sied dans ce genre de texte: les œuvres "translocalisées". Il s'agit d'œuvres qui ont été emportées de nos régions, de Flandre, de Bruxelles, de Wallonie, vers la France révolutionnaire et par la suite, la France napoléonienne.

Ce cadre de départ, qui était la proposition que j'avais déposée, a pu, au fil de nos travaux, être étendu. Comme dit Houellebecq, il y a eu une extension du domaine de la lutte – à la restitution d'œuvres d'origine africaine conservées dans notre pays, essentiellement au musée de Tervuren. C'est évidemment sur ce point que l'audition de M. Gryseels était fondamentale. Il a pu nous rassurer quant au risque souvent mis en avant d'ouvrir la boîte de Pandore et d'entamer un processus conduisant à vider Tervuren de toutes ses collections. Selon le directeur du musée, ce risque n'existe pas. M. Gryseels a même confirmé la volonté de dialoguer avec les États africains demandeurs et partenaires, de manière à garantir à leur population le droit d'accès à leur mémoire et à sa conservation. Des pistes existent donc et des initiatives sont déjà prises en ce sens soit par le musée de Tervuren, soit, comme le ministre De Croo l'a dit en commission, par la Coopération au développement.

Ces éléments ont permis l'ajout d'amendements importants, dont je salue les auteurs, ainsi qu'une modification de l'intitulé pour tenir compte de cette "extension du domaine de la lutte". On ne parle donc plus seulement de l'entame de ce dialogue avec l'État français, mais la proposition est désormais intitulée: "Proposition de résolution relative aux œuvres d'art translocalisées en général et à l'entame d'un dialogue avec l'État français".

Depuis le discours du président Macron à Ouagadougou, le 28 novembre 2017, il est, en effet, devenu indéniable qu'à côté de la dimension strictement muséale, est venue s'ajouter une dimension importante de diplomatie culturelle par le biais de la problématique de la restitution des œuvres patrimoniales et artistiques.

J'insiste sur cette ouverture d'esprit de la part du conservateur d'un de nos plus grands musées, parce qu'il faut relire le discours d'Aimé Césaire sur le colonialisme. Je vous le conseille fortement pour tout ce qui concerne la réflexion qui devra être menée par rapport à notre période coloniale. Aimé Césaire affirme ceci: "Le musée par lui-même n'est rien. Rien! Et il ne veut rien dire. Il ne peut rien dire, là où la béate satisfaction de soi-même pourrit les yeux, là où, avoué ou non, le racisme tarit la sympathie". C'est un très beau discours.

Cela signifie que, dans la dimension muséale, une politique doit être menée à l'égard de l'autre. L'approche muséale dans notre pays doit participer à la réconciliation possible entre des cultures vivantes, de même qu'à un travail de reconnaissance de notre histoire collective.

Des pas ont déjà été accomplis en ce sens lors de la réouverture du musée de Tervuren, mais c'est insuffisant. Ce processus doit être poursuivi. Des musées se créent en Afrique. Il faut insister sur ce point parce qu'un des arguments utilisés pour ne pas restituer des œuvres, c'est qu'il n'y aurait pas l'infrastructure nécessaire pour pouvoir les conserver en toute sécurité. Maintenant, il y a une politique muséale naissante. Il faut notamment saluer le Musée des civilisations noires à Dakar.

L'Afrique a assez souffert. Nous en avons beaucoup parlé en commission et il faut pouvoir panser les plaies et aider à leur cicatrisation.

La diplomatie culturelle, fondée notamment sur la restitution d'œuvres, est à cet égard un magnifi­que instrument. Une telle diplomatie culturelle peut aussi se révéler efficace – c'est l'autre versant – sur le terrain européen et même sur le terrain de la relance européenne.

J'en reviens ainsi au point de départ de la résolution: les œuvres d'art emportées de façon méthodique (c'était organisé) par les troupes de la Révolution française et ensuite par les forces napoléoniennes sont des œuvres emportées de Flandre, de Bruxelles et de Wallonie.

Je ne vais pas reprendre tous les débats que nous avons eus en commission mais il me semble nécessaire d'insister sur le fait qu'il ne s'agit nullement, chers collègues, d'une déclaration de guerre culturelle à la France. Il s'agit de demander au gouvernement de proposer à l'État français d'ouvrir un dialogue à propos d'œuvres, comme des Rubens, des Van Dyck, tout un ensemble de grands noms de l'histoire de l'art dans nos provinces, qui ont été emportées par la force, qui sont conservées dans des musées français et pour lesquelles aucun titre d'acquisition ne peut être fourni, et pour cause.

Entre le principe officiel d'inaliénabilité du patrimoine "français" et la restitution pure et simple, il existe en effet un éventail de solutions, comme la mise à disposition, la propriété partagée, l'échange, etc. Ce qui importe, c'est la vision politique de ce dossier. C'est elle qui doit faire reculer les craintes légitimes, les arguments spécieux, les égoïsmes nationaux, les fixations des conservateurs. Cette vision politique a déjà été mentionnée au sein de diverses assemblées dans notre pays, notamment au Parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles dont se souvient M. Cheron puisqu'il y était présent lors des débats que nous avons eus. Des discussions ont également eu lieu au Parlement flamand, au Parlement de la Région bruxelloise, à la Chambre, au Sénat et au Parlement européen sur ce thème.

Il faut reconnaître que le président français Emmanuel Macron, et même en partie contre l'avis de sa propre administration, a donné un fameux coup d'accélérateur à ce dossier. Quelle est cette idée politique? Elle est internationale et plus directement, européenne. Nous savons en effet que l'Union européenne a besoin de gestes de confiance entre les États, tout particulièrement aujourd'hui. La France, ce grand État européen, peut, grâce à son histoire culturelle et à sa richesse patrimoniale, y contribuer via de tels échanges, accords et restitutions. Je suis certain que nos amis français peuvent le comprendre et qu'ils l'ont peut-être même déjà compris.

Enfin, si, comme je l'espère, le texte enrichi des amendements est voté tout à l'heure, il comprend aussi la demande d'œuvrer à un cadre juridique international. En effet, et ce ne sera pas la moindre qualité du vote que nous exprimerons, il sera observé – je puis vous le garantir – par nos partenaires africains et européens. Il pourra aussi servir d'exemple et d'argument, par exemple, dans le débat entre la Grèce et le Royaume-Uni à propos des frises du Parthénon. L'ouverture de ce dossier par notre pays, qui se situe au cœur de l'Europe, aura des répercussions positives. L'époque coloniale ne sera pas complètement achevée, aussi longtemps que ne sera pas résolue dans le dialogue la question de la mémoire.

Je conclurai en rappelant que, si cette question a connu de nouveaux développements, notamment à travers la restitution à des familles et institutions juives des biens culturels volés par les nazis, elle préoccupe depuis longtemps de grands humanistes. Il s'agit bien d'un thème lié à l'humanisme. Je ne citerai que deux exemples. Tout d'abord, je mentionnerai l'historien Polybe. Je lis beaucoup d'historiens ces jours-ci; j'ai commencé ce matin …

Polybe, il y a 2 200 ans, a décrit la double peine que le vainqueur inflige au vaincu en le privant non seulement de son patrimoine culturel, mais en l'invitant qui plus est à admirer dans ses propres villes le spectacle humiliant de ses dépouilles.

Autre auteur important: je citerai Cicéron. Le premier procès relatif à un dossier de ce type est plaidé par Cicéron dans l'affaire Verrès. Je m'adresse aux juristes et aux constitutionnalistes. Ce despote avait dépouillé la Sicile, dont le protectorat lui avait été confié par Rome. Il avait tout simplement dépouillé la Sicile de toutes les œuvres d'art qui s'y trouvaient. Le procès Verrès eut lieu en 70 av. J.-C. Cicéron avait demandé un délai de 110 jours pour pouvoir mener son enquête. Finalement, Verrès s'est exilé.

Verrès utilisait, pour repérer les œuvres intéressantes, ce que Cicéron a appelé des limiers. Napoléon a fait la même chose dans notre pays. Il envoyait des spécialistes, des commis­saires, pour repérer les endroits où il y avait des œuvres importantes.

Non, je ne compare pas Napoléon à Cicéron. Finalement, je pourrais comparer Napoléon à Verrès. Mais je n'irai pas jusque-là.

Il n'empêche que le processus était le même. Des œuvres ont été emportées de plusieurs de nos villes – de Liège, de Courtrai, de Gand, d'Anvers, de Tournai, etc. Si des œuvres importantes, des Rubens et d'autres, ont été emportées, c'est parce que des limiers venaient les repérer.

Voilà ce que Cicéron dit au nom des Siciliens: "La Sicile entière, si elle pouvait s'exprimer d'une seule voix, elle vous dirait: ce que j'avais d'objets d'art et de parures dans mes villes, mes maisons, mes sanctuaires; ce que j'avais de droit sur ces choses, toi, Verrès, tu me l'as arraché et emporté. À ce titre, je réclame, en vertu de la loi, que cela me soit restitué." Je vous remercie pour votre attention.


Gwenaëlle Grovonius PS | SP

Monsieur le président, j'aimerais saluer l'initiative de M. Miller, qui a rédigé et défendu ce texte qui lui tient à cœur depuis de nombreuses années. Ce texte a permis de mener un débat bien plus large que ce que l'intitulé laisse entendre. Il a en effet été l'occasion d'aborder la question de la restitution des biens culturels et patrimoniaux africains acquis durant la période coloniale.

La résolution contient des demandes précises dans ce cadre. Premièrement, la nécessité d'un cadre juridique international réglant la restitution du patrimoine culturel entre États. Deuxièmement, la nécessité de commander, à l'instar de la France, une inventorisation et une analyse de l'origine des objets culturels, de l'art et des restes humains faisant partie des collections de musées belges, en particulier de la collection provenant d'Afrique centrale. Enfin, le besoin de renforcer le dialogue avec les États tiers d'où proviennent des biens patrimoniaux et culturels conservés dans les musées belges afin d'en assurer la valorisation conjointe.

Il faut bien avouer que depuis la réouverture du musée royal de Tervuren, renommé l'Africa Museum, la colonialité de nos institutions et de nos pratiques est au centre de nombreux débats dans nos différents parlements, au sein de la société civile et dans nos médias.  D'après des experts et l'ancienne ministre de la Culture Aminata Traoré, entre 90 et 95 % des biens culturels d'Afrique, principalement d'Afrique subsaharienne, se trouveraient hors de ce continent. L'ampleur de cette privation matérielle et immatérielle est interpellante. S'il est difficile d'en mesurer les conséquences directes et indirectes, il est en revanche nécessaire et urgent de s'interroger sur cette problématique aux plans politique, diplomatique et scientifique.

L'audition de M. Guido Gryseels, directeur général du Musée royal de l'Afrique centrale, a été très utile à nos débats, notamment sur la question de la restitution du patrimoine culturel africain, une question aux multiples facettes. Comme il l'a indiqué, c'est en partie le résultat du rapport sur la restitution du patrimoine établi par Mme Bénédicte Savoy et M. Felwine Sarr à la demande du président Macron, en France. Ce rapport a en outre donné lieu à un grand débat international. La Belgique se doit évidemment de jouer un rôle dans ce cadre.

Si, selon M. Gryseels, jusqu'à présent, aucun pays africain n'a demandé de restitution au musée de Tervuren, il insiste néanmoins pour que la Belgique, à l'instar de la France, se saisisse de cette problématique sans attendre. Lors de son audition, M. Gryseels a ainsi plaidé pour "créer un groupe de travail chargé d'examiner les possibilités et la problématique de la restitution avec un certain nombre d'experts et élaborer le cadre juridique pour une éventuelle restitution".

C'est précisément l'objet de l'amendement que mon groupe a déposé en séance plénière: constituer un groupe de travail interdisciplinaire composé d'experts belges, européens et africains avec pour mission l'inventaire des biens culturels et patrimoniaux africains conservés actuellement par des musées belges, leur statut et les conditions dans lesquelles ils ont été acquis.

Notre amendement propose également d'organiser une conférence internationale sur ces questions pour faire avancer le débat, la réflexion et les pistes de solution. C'est un amendement qui vise donc ni plus ni moins à compléter l'excellent travail constructif que nous avons mené en commission. Cet amendement s'inscrit aussi pleinement dans les engagements pris en commission par notre premier ministre.

Ce groupe de travail devrait permettre d'enfin faire le point sur les conditions dans lesquelles ces collections ont été acquises ainsi que sur la question de leur conservation et de leur restitution. L'intérêt est également que ses conclusions puissent être présentées à notre Assemblée. Il serait donc essentiel que le gouvernement fédéral prenne l'initiative de mettre sur pied ce groupe de travail et organise cette conférence internationale sur ces questions, pour faire avancer le débat, la réflexion et les pistes de solution.

De tout temps, des objets ayant appartenu à des peuples se sont retrouvés chez d'autres peuples. La complexité des demandes actuelles de restitution, en raison de la diversité des circonstances qui ont gouverné le déplacement des objets, nécessite d'inventer de nouvelles règles qui tiennent compte de l'intérêt que nous partageons pour une répartition plus juste des ressources culturelles.

Car, oui, le travail autour de notre passé colonial est essentiel et énorme. Surtout, nous le savons tous, il est loin d'être terminé. Même cette résolution n'est pas parfaite, notamment sur la question de la cogestion des collections.

En parcourant les allées de certains musées, en lisant le nom de certaines rues ou même en regardant certaines fresques ou certains panneaux dans nos maisons communales et hôtels de ville, nous savons qu'il reste évidemment du chemin à parcourir pour expliquer et contextualiser notre passé, avec un regard critique, historique et scientifique. Nous ne devons pas le gommer. On ne peut pas gommer notre passé. Par contre, nous devons l'utiliser et l'analyser pour en sortir grandis, et surtout, pour faire évoluer nos sociétés, nos mentalités, nos consciences et nos inconscients, notamment dans les représentations que nous avons encore des personnes vivant sur le continent africain, mais aussi de nos concitoyens afro-descendants.

Si le travail est énorme, il nous revient de le mener. Je vous livre une citation qu'on ami vient de partager avec moi dans le cadre de ce débat. Un proverbe africain, souvent cité, dit: "Tu as beau accumuler la poussière sous ton lit, un jour, tu vas déménager." Il est donc essentiel que nous menions ce travail. C'est pourquoi, à titre d'exemple, j'ai également déposé une motion au conseil communal de Namur, sur la question de la décolonisation de nos espaces publics. L'histoire coloniale de notre pays ne peut plus être un tabou. Je pense d'ailleurs que les mentalités évoluent dans le bon sens, y compris au musée de Tervuren.

Il s'agit d'amplifier cette prise de conscience au sein de nos différentes institutions culturelles, mais également dans la société en général, en collaboration avec l'ensemble des acteurs publics, privés ou académiques de notre pays. Le momentum est là. L'Histoire doit dire son mot. L'histoire coloniale de notre pays a aussi été marquée par des violences, des massacres et des crimes coloniaux auxquels il faut faire face pour construire un avenir meilleur pour toutes et tous.

Nous devons reconnaître les nombreuses souffrances humaines et déchirures pour en tirer les leçons et poser les actes qui s'imposent.

Vous l'aurez compris, le débat s'étend bien au-delà des collections du musée de Tervuren ou d'un autre musée. Il porte finalement sur l'ensemble de notre passé colonial, comme l'a illustré le travail que nous avons réalisé, voici près d'un an déjà, sur la reconnaissance de la ségrégation subie par les métis issus de la colonisation belge en Afrique, travail dont nous pouvons être fiers.

De même, je serai très fière de soutenir le texte qui nous est soumis aujourd'hui, en espérant que mon amendement pourra l'enrichir et recueillir votre soutien.

Enfin, monsieur le président, notre résolution votée le 29 mars 2018 prévoyait que le gouverne­ment prononce une déclaration solennelle reconnaissant la ségrégation dont ont été victimes les enfants métis arrachés à leurs mères noires durant la colonisation. J'espère qu'avant la fin de cette législature, et comme il me l'a été promis en commission par notre premier ministre, Charles Michel, celui-ci viendra, entre ces murs, pour honorer ses engagements. J'espère que vous aurez à cœur, comme président, de rendre cette déclaration possible.

Je vous remercie pour votre attention.


President Siegfried Bracke

Merci, madame Grovonius.

Je puis vous dire que la déclaration gouvernemen­tale que vous avez mentionnée aura normalement lieu d'ici deux semaines, à savoir le 28 mars 2019.


Véronique Waterschoot Ecolo

Monsieur le président, chers collègues, soyez rassurés, je ne prendrai pas les 110 jours accordés à Ciceron et je serai brève.

Mon groupe soutiendra avec intérêt cette excellente résolution de notre collègue Miller pour son objectif, que vous avez brillamment défendu, et aussi car elle entre en résonance avec les débats, plus larges, concernant la restitution d'œuvres ou de biens injustement dérobés. Ils se sont notamment réveillés autour de la réouverture du Musée de Tervueren, l'Afrikaans Museum et ils vivent aussi aux niveaux mondial et européen à travers l'UNESCO.

Certains amendements que nous avons soutenus ont, par ailleurs, indirectement introduit notre passé colonial dans cette question qui couvrait initialement, pour rappel, des œuvres belges translocalisées par les troupes de la révolution française. En effet, la question des excuses de la Belgique au Congo, au Rwanda, au Burundi pour notre passé colonial est aujourd'hui à nouveau dans l'actualité.

Deux événements récents ont contribué à réveiller ce débat: tout d'abord, un rapport d'experts de l'ONU recommandant notamment à la Belgique d'œuvrer à un travail de mémoire et ensuite, un intéressant colloque organisé par l'ULB à propos des restes humains congolais dérobés par nos militaires et médecins belges à l'époque de la colonisation.

Ces événements ainsi que la résolution de mon collègue Miller, votée à l'unanimité en commission – je tiens à le souligner – ont donné semble-t-il une nouvelle visibilité à la parole de la société civile et aux associations d'afro-descendants à l'égard de notre passé colonial. Ils ont aussi réveillé la conscience des politiques qui se sont exprimés à différents niveaux de pouvoir et dans les médias en faveur d'un travail approfondi de mémoire. Personnellement, je m'en réjouis car cela traduit, à mon sens, les prémices d'un con­sensus sur la nécessité d'un examen approfondi de ce passé douloureux et de la manière de l'interpréter comme de lui donner suite.

Afin de prolonger cet élan donné au sein de notre Parlement par la résolution de M. Miller que nous nous apprêtons à adopter, j'invite mes collègues à prendre connaissance d'une résolution déposée par mon groupe, il y a déjà deux ans, cosignée par certains partis. Elle invite à installer un groupe de travail interdisciplinaire et international qui serait chargé d'un travail d'analyse approfondi.

Un travail qui pourrait aider notre pays à construire un discours officiel reconnaissant le rôle de l'État et des institutions belges dans leur ensemble durant cette période de colonisation.

Ce texte, qui sera examiné la semaine prochaine en commission des Relations extérieures, pourrait à mon sens prolonger la dynamique initiée par la présente résolution et permettre à notre Parlement d'avancer résolument sur ces questions, ceci avant la dissolution des chambres; dans l'esprit de la proposition de travail constructive faite par Mme Grovonius et de manière à répondre à une demande de la société civile qui est là, patente, et que chacun d'entre nous a dû recevoir.