Proposition 55K0263

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Projet de loi modifiant la loi du 4 avril 2014 relative aux assurances en vue d'établir dans le domaine de l'assurance maladie et de l'assurance individuelle sur la vie une restriction de traitement des données à caractère personnel concernant le mode de vie ou la santé issues des objets connectés.

General information

Authors
PS | SP Malik Ben Achour, Ludivine Dedonder, Ahmed Laaouej, Christophe Lacroix, Patrick Prévot, Sophie Thémont, Philippe Tison
Vooruit Melissa Depraetere
Submission date
June 20, 2019
Official page
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Status
Adopted
Requirement
Simple
Subjects
data protection new technology information technology applications insurance law health insurance

Voting

Voted to adopt
Groen CD&V Vooruit Ecolo LE PS | SP DéFI Open Vld N-VA LDD MR PVDA | PTB
Abstained from voting
VB

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Discussion

Oct. 8, 2020 | Plenary session (Chamber of representatives)

Full source


President Patrick Dewael

Onze rapporteur is collega Freilich. Hij verwijst naar zijn schriftelijk verslag.

Le premier orateur dans la discussion générale est M. Lacroix que j'ai confondu avec M. Ben Achour.


Christophe Lacroix PS | SP

Monsieur le président, il n'y a évidemment aucun souci. Je n'ai pas une susceptibilité telle qu'être confondu avec mon collègue et ami Malik Ben Achour me causerait un problème.

Mes chers collègues, nous avons beaucoup travaillé en commission sur cette proposition de loi. Le Parlement a travaillé depuis de très nombreuses années sur le sujet de l'intelligence artificielle, de ses avancées qui sont remarquables, mais également des dangers sous-jacents à l'utilisation qui peut en être faite.

Le Parlement, par le passé, s'est inquiété et a pris des initiatives en ce qui concerne l'enjeu majeur de la protection des consommateurs, en particulier la protection des consommateurs liée à l'irruption des nouvelles technologies dans notre économie.

Je voudrais citer, sans remonter à Mathusalem, le travail qui a été réalisé sous la précédente législature au Sénat, où je siégeais d'ailleurs à l'époque, à l'initiative de mon groupe. Ce travail a abouti à un rapport d'information sur l'impact du développement des nouvelles technologies et de l'intelligence artificielle sur l'économie.

Et puis, sous la précédente législature, une grande partie du travail a été réalisée à la Chambre par le Comité d'avis pour les questions scientifiques et technologiques. Celui-ci avait enquêté sur l'utilisation des mégadonnées dans le secteur de la santé. Il en était d'ailleurs sorti une résolution, adoptée en mars 2019 et qui prévoyait différentes recommandations, parmi lesquelles une concerne spécifiquement nos travaux et le texte sur lequel nous allons voter tout à l'heure. Cette recommandation disait qu'il fallait veiller à ce que les patients soient protégés contre tout risque d'abus de leurs données de santé, notamment par les assureurs ou à des fins commerciales.

La présente proposition s'inscrit donc tout à fait dans cette perspective et dans cette dimension.

Chers collègues, aujourd'hui, les objets connectés sont présents de manière importante dans notre quotidien, que ce soit la domotique, les applications mobiles pour calculer le nombre de pas ou le nombre de calories que nous ingurgitons par jour, la géolocalisation par GPS sur smartphone, etc.

À l'échelle mondiale, en 2020, nous recensons, tenez-vous bien, près de 20 milliards d'objets connectés.

Si les données récoltées peuvent constituer une opportunité dans le domaine médical et vraiment d'intéressantes opportunités, elles représentent pourtant un risque spécifiquement dans le domaine des assurances, tant en termes de protection de la vie privée qu'en termes d'accès ou bien de coût de l'assurance pour nos concitoyens. Les exemples ne manquent pas. En Belgique, des assurances voitures destinées aux jeunes de moins de 26 ans octroient déjà une réduction de prime si le conducteur embarque dans son véhicule un objet connecté qui analyse à tout moment sa conduite, son allure, sa vitesse, ses freinages, ses accélérations. À l'étranger, certaines formules d'assurance intègrent les habitudes sportives et les comportements alimentaires des clients mesurés à l'aide d'un bracelet connecté, les bons comportements entraînant des réductions de primes ou des avantages comme des places de cinéma ou des billets d'avion.

On peut se dire qu'effectivement, avoir un système qui incite aux bons comportements et qui amène une réduction des coûts pour le consommateur est une bonne solution mais l'effet pervers de ce système, c'est qu'on individualise le prix, le tarif, l'accès à l'assurance. Le coût de celle-ci ne tient pas compte de la non-égalité de chacun et de chacune par rapport à la santé.

Quand vous êtes plus précarisé et que vous vivez dans un logement qui est à la limite de l'insalubrité, qu'il y a de l'humidité dans ce logement, qu'il y a des champignons, des mycoses qui se développent dans cette habitation, votre santé en souffre, la vôtre, celle de vos enfants. Vous êtes victime de votre précarité sociale et économique. Il ne serait donc pas normal que ces citoyens qui sont déjà des victimes de la précarité sociale ou économique soient victimes d'un surcoût d'assurance ou bien d'un refus d'assurance parce qu'on estime que ce sont des personnes à risque et que les compagnies d'assurances décident de ne pas assurer ces personnes en termes d'assurance de soins de santé. Or, s'il y a bien quelque chose qui est à l'ordre du jour aujourd'hui et qui le sera encore pour longtemps, c'est la préoccupation sanitaire. Comment faisons-nous en sorte que nos concitoyens restent en bonne santé indépendamment de leur situation socioéconomique?

Par rapport à ces dangers sous-jacents à l'intelligence artificielle, je voudrais vous faire part de deux citations pour nourrir votre réflexion. La première ne vient vraiment pas d'un socialiste ou d'un communiste. Elle provient d'Henri de Castries, PDG d'AXA en 2014. Je ne pense pas qu'il fasse partie de la section de l'Union socialiste communale de ma zone.

Henri de Castries dit ceci: "Le Big Data permet de comprendre le client bien mieux qu'il ne se comprend lui-même." C'est quand même fondamental. Et il le dit sans crainte. Une seconde citation provient du patron d'Insurtech Capital, M. Minh Tran, qui a dit en 2018: "Les assureurs ont aujourd'hui la capacité de faire de l'assurance personnalisée, notamment grâce aux données de l'usager que l'on peut récupérer à travers les objets connectés. Et puis, c'est plus intéressant d'assurer les personnes en bonne santé." CQFD. Vous voyez donc comment le secteur des assurances veut, par le biais des objets connectés, assurer les "bons" risques, c'est-à-dire assurer les gens qui risquent le moins souvent de tomber malades ou qui, en tout cas, risquent le moins souvent d'être hospitalisés parce qu'ils bénéficient au départ d'un capital santé qui est intéressant pour la compagnie d'assurances.

Au cours des débats que nous avons eus en commission, la majorité des collègues ont martelé - et je le redirai ici - un véritable refus de ce modèle d'assurance où des données à caractère personnel issues des objets connectés sont recueillies sur internet et permettent à l'assureur d'exclure les "mauvais" risques - et nous savons qui ils sont: les personnes les plus précarisées - ou bien de faire payer plus cher ceux qu'un algorithme (une intelligence artificielle), indépendamment de tout examen médical, aura considérés comme faisant partie des "mauvais" risques.

Un principe nous semble fondamental, à nous socialistes - mais ce doit être le cas pour d'autres collègues -, car nous estimons que la solidarité entre les assurés doit rester une pièce centrale dans le fonctionnement des assurances. C'est pourquoi la présente proposition de loi prévoit deux mesures dans le champ des assurances (vie et santé). Premièrement, il faut donner le droit aux consommateurs de refuser d'acquérir ou d'utiliser un objet connecté dans le cadre de son contrat d'assurance sans risque que la compagnie le supprime ou bien qu'elle l'exclue. Deuxièmement, cette proposition de loi vise à interdire à l'assureur de pratiquer des tarifications différentes, ce que l'on appelle des segmentations, selon que le consommateur accepte ou non de se servir d'un objet connecté ou sur la base des données issues desdits objets.

L'objectif de cette proposition de loi est donc - je la résume en une phrase - de mieux protéger le consommateur et d'éviter certaines dérives liées à l'utilisation des objets connectés dans le champ des assurances (vie et santé).

Je remercie vraiment tous les collègues de la commission de l'Économie pour leur collaboration constructive dans le cadre de ce dossier. Madame la présidente, je vous remercie d'avoir accès au perchoir pendant quelques instants, ce qui me permettra de vous saluer de manière bien sympathique.


Florence Reuter MR

Madame la présidente, chers collègues, effectivement, nous sommes tous dans un monde en perpétuelle évolution. Les nouvelles technologies, les progrès numériques comportent de nombreux atouts et permettent, il est vrai, une véritable amélioration de notre qualité de vie. Sauvegarde des données, facilité d'accès aux services commerciaux, mobilité au travail, échange direct avec les consommateurs, les avantages sont nombreux.

Mais, dans le domaine de la santé, si les nouvelles technologies sont là aussi une véritable opportunité de révolutionner la médecine, ce n'est pourtant pas sans effets pervers pour la protection des consommateurs et le respect du droit à la vie privée. Les nouvelles applications qui voient le jour permettent aux utilisateurs d'enregistrer des données liées à leur mode de vie ou à leur état de santé et cela inquiète. Certains assureurs exigent d'avoir accès à ces données privées, ce qui soulève de nombreuses questions concernant la sécurisation et la confidentialité de ces données. Une certaine discrimination a même pu être constatée entre leurs clients en bonne santé et les autres en moins bonne santé.

Un cadre législatif était donc essentiel pour empêcher ce genre de dérives. L'objectif est simple: protéger les données personnelles et interdire l'utilisation de ces informations par les compagnies d'assurances. Pour mon groupe, il est essentiel d'encourager l'innovation technologique, certes, mais pas au détriment des consommateurs. La protection de leurs données personnelles est une priorité. C'est pourquoi nous soutiendrons cette proposition. Je vous remercie.


Roberto D'Amico PVDA | PTB

Madame la présidente, je voulais intervenir pour apporter notre soutien à une proposition de loi qui permet, selon nous, de poser un cadre indispensable aux évolutions technologiques actuelles. Nous reconnaissons, en effet, que ces évolutions veulent apporter un certain progrès, comme le fait que des objets connectés puissent améliorer notre mode de vie. Mais nous souhaitons que ces avancées soient orientées au service de la population, rien qu'à son service. Car nous savons tous que ces nouvelles technologies représentent actuellement, et davantage encore à l'avenir, un business extrêmement fructueux.

Les multinationales, avec leur choix de profits sans limite, ne manquent évidemment pas de réclamer leur part du gâteau. Sans surprise, le secteur des assurances n'est pas en reste. Il a bien compris que l'exploitation des données personnelles issues des objets connectés permet d'accroître leur marge, comme si celle-ci n'était déjà pas assez confortable d'ailleurs.

Avec le PTB, nous refusons ce comportement de vautours. Nous refusons que la commercialisation de nos données personnelles serve à accroître les bénéfices de certaines firmes, peu scrupuleuses des valeurs éthiques. Les pratiques de quelques entreprises à l'étranger témoignent déjà de cette tendance. Ainsi, le prix de certaines assurances vie et assurances maladie est conditionné aux résultats de l'objet connecté, qui mesure le bon comportement sportif et alimentaire de la personne. Cela signifie que ce sont, de nouveau, les publics vulnérables qui paieront le prix fort. Ainsi, parce qu'une personne ne sait pas s'offrir une alimentation saine, elle paiera plus cher ses primes d'assurances. C'est une double peine pour ces personnes. Alors, oui, ce type de pratique venu tout droit des États-Unis doit être interdit en Belgique! Ce n'est pas notre modèle de société! Les assureurs doivent le savoir! Ici, on mutualise les risques, on ne les individualise pas. C'est le fondement de notre système de protection sociale. Les assureurs n'y dérogeront pas.

Ensuite, se pose la question du traitement de nos informations privées, qui est soulevé par cette proposition de loi. À l'heure du Big Data et du monopole de certains géants de l'informatique, comme Google, les citoyens sont dépossédés de leurs propres données personnelles. Alors, leur interdire d'utiliser certaines de nos données, issues d'objets connectés, c'est envoyer un message fort à ces multinationales. Elles doivent comprendre qu'on ne fait pas n'importe quoi.

Pour l'ensemble de ces raisons, le PTB soutiendra ce texte.